Cinq anciens ministres face à la justice : l’Assemblée enclenche la procédure de mise en accusation

La journée d’hier aura marqué un tournant majeur dans la mise en œuvre de la reddition des comptes annoncée par le régime en place. Au terme de débats houleux à l’Assemblée nationale, les députés ont voté en faveur de la mise en accusation de cinq anciens ministres du régime de Macky Sall. Une décision institutionnelle forte, sans esprit de règlement de comptes, mais en conformité avec l’exigence républicaine de transparence et de responsabilité.

Les personnalités visées sont : Amadou Mansour Faye, ancien ministre du Développement communautaire, Aïssatou Sophie Gladima, ex-ministre des Mines, Moustapha Diop, ancien ministre de l’Industrie, Salimata Diop Dieng, ancienne ministre de la Femme, et Ismaïla Madior Fall, ex-ministre de la Justice.

Les quatre premiers sont cités dans les conclusions des corps de contrôle sur la gestion du fonds Force-Covid-19, mis en place en 2020 avec une enveloppe exceptionnelle de 1 000 milliards de francs CFA. Ce fonds destiné à amortir l’impact de la pandémie sur les ménages, les entreprises et le système sanitaire a fait l’objet de nombreuses irrégularités : passations de marchés gré à gré, dépenses non justifiées, opérations en espèces, absence de pièces comptables, entre autres.

Des lignes budgétaires massives sont aujourd’hui mises en cause. Au ministère de la Femme, 2,5 milliards auraient été dépensés sans traçabilité claire. Le PUDC, mobilisé pour la distribution de vivres, a géré 18 milliards dans des conditions peu transparentes. D’autres lignes interpellent, comme 2,7 milliards pour l’achat de riz ou 65 millions pour du gel hydroalcoolique.

Concernant Ismaïla Madior Fall, son dossier est d’une nature totalement différente. Il est mis en cause dans une affaire de corruption, dans laquelle il aurait, selon ses propres déclarations, remboursé « diplomatiquement » la somme de 50 millions de francs CFA . Ce geste, loin d’éteindre les poursuites, a relancé les interrogations sur les pratiques tolérées au sommet de l’Etat, même dans les cercles les plus théoriquement irréprochables.

Deux des anciens ministres concernés, Moustapha Diop et Salimata Diop Dieng, bénéficiaient jusque-là de leur immunité parlementaire. Celle-ci a été levée dans la foulée, ouvrant la voie à leur audition par la Commission d’instruction de la Haute Cour de justice, seule habilitée à juger d’éventuels délits commis dans l’exercice de fonctions ministérielles.

Pour les autorités, cette procédure s’inscrit dans une volonté claire d’assainissement. Elle traduit une évolution notable des pratiques, dans un pays longtemps habitué à l’impunité au sommet de l’Etat. La mise en accusation de ces figures de l’ancien régime sonne donc comme un avertissement : désormais, toute gestion publique devra s’accommoder du regard scrutateur de la justice.

PROMEDIA

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *