Covid19 : couvre-feu pour les pauvres, festin pour les puissants


Par Mamadou Sèye

Pendant qu’on obligeait les Sénégalais à rentrer chez eux à 20 heures, pendant qu’on vidait les rues au nom de la lutte contre un virus planétaire, dans les couloirs feutrés de la haute administration, certains vidaient les caisses sans remords ni honte.

Le pays vivait sous tension. Les mères rationnaient les repas. Les enfants comprenaient, malgré leur jeune âge, que le pain du lendemain n’était pas garanti. Les petits commerçants comptaient les pertes, les vendeuses de café Touba pliaient leurs tables à peine installées. La peur planait, mais plus encore, le manque. Et dans ce vacarme de sirènes et d’angoisses, une poignée de privilégiés, eux, préparaient tranquillement leur festin.

Aujourd’hui, le rideau tombe. Les chiffres sortent, les rapports s’empilent, les preuves s’accumulent. Et ce qu’ils révèlent est indécent. Une opération d’escroquerie à grande échelle, orchestrée au moment où la nation avait besoin de solidarité, d’éthique, de loyauté.

Ce n’est pas simplement de la corruption. C’est une insulte à la souffrance des familles. C’est un crachat sur le visage des soignants qui se battaient à mains nues. C’est une gifle à la mémoire des morts.

Ils ont osé. Oui, ils ont osé détourner l’argent des respirateurs, des masques, des vaccins. Ils ont détourné le peu qu’on avait, pendant que le peuple détournait les yeux pour ne pas pleurer. Ils ont signé des marchés fictifs, surfacturé des équipements, maquillé des comptes, avec la même désinvolture qu’un gamin qui gribouille sur un cahier.

Et maintenant ? Où sont-ils ? Que risquent-ils ? Un rappel à l’ordre ? Une mutation ? Un silence ? Le peuple, lui, n’oubliera pas. Nous n’oublierons pas.

Ce scandale n’est pas un épisode de plus. C’est une fracture. Une blessure ouverte. Et tant que justice ne sera pas rendue, tant que les responsables ne seront pas jugés, condamnés, écartés de la gestion des biens publics, nous resterons en colère. Une colère lucide. Une colère digne.

Le vol en période de pandémie n’est pas un simple vol : c’est un crime. Et ce crime ne restera pas sans nom, sans visage, sans conséquence.

Il est temps de rallumer les lumières. Pas celles des projecteurs pour de beaux discours. Non. Celles de la vérité, de la justice, et du respect dû au peuple.

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