Par Mamadou Sèye
Le président Bassirou Diomaye Faye, largement élu et disposant d’une majorité confortable à l’Assemblée nationale, aurait pu gouverner seul, par la légitimité des urnes. Pourtant, il a choisi la voie du dialogue, de l’écoute, de l’inclusion. Une démarche républicaine forte qui contraste avec les appels au boycott de certains acteurs marginaux, sans ancrage ni mandat populaire, qui peinent à exister autrement que par la contestation de principe.
Il aurait pu s’en passer. Personne ne l’aurait blâmé. Fort d’un vote massif, d’un Premier ministre solide, d’un gouvernement en place et d’une majorité à l’Assemblée nationale, le président Bassirou Diomaye Faye aurait pu tracer sa voie sans jeter un regard dans le rétroviseur. Mais voilà : ce pouvoir nouveau, né d’un élan populaire inédit, a choisi l’écoute comme méthode et la concertation comme boussole. Le dialogue national annoncé n’est donc pas un calcul politicien, mais un geste d’ouverture, presque pédagogique dans une démocratie en construction.
Et pourtant, dès l’annonce du processus, les postures les plus classiques sont ressorties du placard. Une partie de la société civile — celle qui rêve encore d’un Conseil des Sages sans ancrage, d’une tripartite Sonko-Diomaye-Macky comme si l’histoire pouvait être réécrite autour d’un café — s’est émue de ne pas voir ses schémas utopiques retenus. Et quelques figures politiques en mal de suffrages, à la représentativité microscopique, ont sorti leur costume de résistants pour agiter la menace du boycott. Ce sont les “singletons politiques”, ces acteurs sans troupe, sans programme cohérent, sans poids électoral, qui confondent visibilité médiatique et légitimité démocratique.
Il y a ici un malentendu profond. La politique ne se réduit pas à l’activisme, ni à la nostalgie d’un ordre perdu. Elle repose sur des mécanismes simples : le suffrage, la responsabilité, le dialogue. En initiant cette concertation nationale, le président Diomaye Faye ne cherche pas à se légitimer — il l’est déjà. Il tend simplement la main à toutes les forces vives, dans une logique de consolidation, de co-construction. Refuser d’y participer, c’est avouer son inadaptation à l’exercice démocratique.
D’autant que cette politique de la chaise vide, si elle a pu faire illusion à certaines époques, n’a jamais produit que du bruit. Elle ne freine pas les processus, ne bloque pas les institutions, ne suspend pas les réformes. Elle isole ceux qui la pratiquent et renforce ceux qui avancent. Les acteurs lucides de la classe politique sénégalaise l’ont bien compris. C’est par la présence, par les propositions, par le débat contradictoire qu’on pèse dans une démocratie. Pas en boudant le terrain de jeu.
Ceux qui réclament un traitement particulier, une reconnaissance symbolique ou une catharsis institutionnelle au-delà des cadres formels oublient que le Sénégal a tourné une page. Le peuple s’est exprimé. Il a choisi un projet, un homme, une équipe. C’est dans ce cadre que le dialogue est proposé. Pas dans le flou de discussions sans queue ni tête, encore moins dans le chantage émotionnel.
Le mérite du président Diomaye est justement de ne pas avoir confondu légitimité populaire et fermeture politique. Son geste est rare, noble, et fort. Il mérite d’être salué. Quant à ceux qui refusent d’y prendre part, qu’ils expliquent à leurs concitoyens les raisons de leur absence. L’histoire, elle, retiendra ceux qui ont contribué. Pas ceux qui ont crié depuis la touche.
Alors, le chantier est là. Hautement dialectique, hautement républicain. Il appartient à chacun de s’y inscrire avec sincérité, sans posture, sans masque. Ceux qui choisiront l’esquive prendront aussi la responsabilité du vide. Et dans la République, le vide ne fait pas de bruit. Il s’oublie.