Par Mamadou Sèye
Franchement, il faut avoir le cœur bien accroché pour suivre le rythme. À peine a-t-on digéré un scandale qu’un autre vous saute au visage, plus gras, plus absurde, plus indécent encore. On en vient à se demander si on n’a pas raté une phase du développement : celle où détourner, trafiquer, surfacturer, devient une compétence valorisée dans les CV.
Le plus sidérant, ce n’est même plus l’ampleur des montants – des milliards qui dansent comme si on parlait de sachets d’eau –, mais la fréquence. On dirait qu’ils ont organisé une ligue parallèle : Ligue 1 de la Malversation. Avec des divisions, des clubs, des montées, des descentes… sauf que là, tout le monde vise la Ligue des champions de la combine.
Et pendant ce temps, le bon peuple regarde, éberlué, abasourdi. Parfois résigné. Parfois ricanant. Mais surtout fatigué. Parce qu’à force d’être choqué, on finit par ne plus l’être. Et c’est là le vrai danger : quand l’indignation devient une routine, l’indifférence n’est jamais loin.
Mais camarade, tout n’est pas perdu. Il reste quelque chose à faire. C’est peut-être même maintenant qu’il faut agir. Redresser la barre. Exiger que les comptes soient vraiment rendus, tous les comptes, de tous les comptes. Pas pour se venger. Pas pour humilier. Mais pour poser, enfin, les bases d’une République décente.
Il y a urgence à réconcilier ce pays avec la rigueur, la justice, la sobriété. A faire comprendre qu’on peut servir l’Etat sans se servir. Que l’élégance, ce n’est pas de voler sans se faire prendre, mais de refuser de voler, tout simplement.
Alors oui, on a le tournis. Mais parfois, le vertige précède le réveil.