Par Mamadou Sèye
Il est là. Assis sur le fauteuil présidentiel, le plus convoité du pays. Et pourtant, il semble ailleurs, presque détaché. Mais que l’on ne s’y trompe pas : Bassirou Diomaye Faye est au centre. Au centre de toutes les attentes, de tous les regards, de tous les frissons d’espérance. Et surtout, au centre du dispositif. Non pas en criant, mais en incarnant. Non pas en s’agitant, mais en agissant. Non pas en s’exposant, mais en pesant.
Son pouvoir est de ceux qui n’ont pas besoin de démonstration. C’est une autorité d’un autre genre : sobre, dépouillée, presque monacale. Et pourtant, son silence pèse mille discours. Son calme détonne dans un pays habitué aux présidences bavardes et omniprésentes. Sa verticalité rappelle cette vérité antique : le vrai chef n’a pas besoin de parler fort, il lui suffit d’être entendu.
Il n’a pas conquis le pouvoir ; c’est le peuple qui est allé le chercher.
Quand il est sorti de prison, ce n’est pas un homme brisé qu’on a vu. C’était un homme prêt. Prêt à servir, non à régner. Prêt à construire, non à punir. Prêt à faire, surtout. Depuis, il agit avec une méthode qui étonne : il ne cherche ni les flashs ni les podiums. Il écoute. Il consulte. Il décide. Et parfois, il frappe. Mais toujours en cohérence.
Ce qui surprend le plus, c’est cette manière nouvelle d’habiter le pouvoir, sans le consommer, sans s’y dissoudre. Un pouvoir sans tapage, sans clan tonitruant, sans affairisme visible. Un pouvoir qui donne le vertige tant il rompt avec les postures habituelles. On le croit effacé ? Il est en réalité sur-présent dans l’essentiel : les arbitrages, les équilibres, les orientations majeures. Il agit comme un artisan qui connaît la valeur du silence et le poids des décisions.
Bassirou Diomaye Faye n’a pas simplement hérité d’un fauteuil. Il a hérité d’un pays blessé, d’un État bousculé, d’un peuple fatigué. Il aurait pu se venger. Il a préféré réparer. Son premier signal fut fort : remettre l’État à l’endroit. Remettre les finances publiques en transparence, relancer les institutions, réconcilier la République avec sa jeunesse. Et, dans un style qui lui est propre, lancer la reddition des comptes, sans tambour, mais avec rigueur. Non pour humilier, mais pour rétablir.
Et puis il y a cette relation unique avec Ousmane Sonko, que beaucoup ont tenté de salir, de fracturer, de détourner. En vain. L’un est feu, l’autre est roc. L’un est verbe, l’autre est regard. Ensemble, ils ont redessiné la grammaire politique du pays. Ce que l’un impulse, l’autre structure. Ce que l’un agite, l’autre ancre. Leur lien est au-delà du politique ; il relève d’un compagnonnage presque mystique, forgé dans l’épreuve, trempé dans la prison, consacré par la légitimité populaire.
On a vu mille tentatives d’opposer le président Diomaye au Premier ministre Sonko. Comme si le Sénégal ne pouvait concevoir deux intelligences solidaires, deux énergies coordonnées. Comme si notre imaginaire politique était condamné à la rivalité. Et pourtant, l’histoire est en train d’écrire autre chose : une gouvernance bicéphale, sans guerre d’ego, où la loyauté n’est pas soumission, mais intelligence partagée.
Aujourd’hui, les premiers résultats sont là. L’apaisement institutionnel, la fin des tensions extrêmes, la relance du dialogue avec les forces vives, la volonté affirmée de revoir les contrats miniers et gaziers, les signaux de rigueur dans les dépenses publiques, le discours républicain revenu à sa noblesse. Rien n’est encore gagné. Mais tout est remis en mouvement.
Bassirou Diomaye Faye n’a pas été élu pour faire du bruit. Il a été élu pour changer le tempo. Il gouverne à contre-rythme, et peut-être même à contre-temps, mais c’est justement cela qui crée une musique nouvelle.
Un peuple qui souffre n’a pas besoin d’un chef de guerre. Il a besoin d’un chef de file, d’un guide discret mais solide, d’un homme d’État dans le sens le plus noble du terme. Diomaye en a l’étoffe. Pas seulement pour ce qu’il fait. Mais pour ce qu’il incarne.
On l’a longtemps vu comme le remplaçant de Sonko. Il est aujourd’hui évident que Sonko ne l’a pas remplacé : il l’a révélé. Et rien que pour cela, l’histoire retiendra qu’il y eut un jour au Sénégal un homme qui eut l’audace d’en élever un autre. Et qu’ensemble, ils ont tenté — et peut-être réussi — de rendre à ce pays sa dignité perdue.
Le temps dira le reste.
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