Par Mamadou Sèye
Quand Cheikh Oumar Diagne qualifie le sommet de Davos de “farce”, on ne sait plus s’il parle du Forum mondial ou s’il soliloque sur son propre glissement vers l’insignifiance. A force de critiquer tout ce qu’il ne contrôle pas, l’homme a troqué la pensée pour la rancune. Et ses accusations sonnent désormais comme le chant d’un ego blessé, pas d’un penseur lucide.
Davos, ce nom évoque chaque année le cœur battant de la planète : politiques, économistes, chefs d’Etat, universitaires, ONG et entreprises s’y retrouvent pour penser l’avenir. On peut en discuter les orientations, débattre des rapports de force qu’il révèle, voire questionner certaines dynamiques. Mais de là à balayer tout cela d’un revers de la main rageur, sous prétexte que l’actuel Premier ministre sénégalais y participe, il y a un gouffre — un gouffre dans lequel Cheikh Oumar Diagne semble avoir précipité ce qui lui restait de crédibilité.
Qualifier Davos de “farce” en 2025, c’est nier les enjeux géopolitiques de la transformation verte, de la régulation numérique, de la souveraineté économique des pays du Sud, ou encore des nouvelles chaînes de valeur. C’est ignorer volontairement que le Sénégal, aujourd’hui, y va avec une parole libérée et une vision souverainiste, non plus en quémandeur, mais en partenaire. Et c’est surtout faire semblant d’oublier qu’il y a peu, quand lui-même avait un strapontin dans les antichambres de la République, il aurait rêvé d’un badge d’accès à Davos, quitte à se fendre d’un selfie devant un chalet.
Mais voilà, il n’est plus là. Et comme souvent, certains anciens initiés deviennent des snipers dès qu’ils sont éloignés du centre. Ce qu’il n’ose pas dire, c’est que le problème n’est pas Davos, mais Ousmane Sonko à Davos. Ce même Sonko qui incarne aujourd’hui ce que lui-même revendiquait hier : une parole libre, un combat panafricain concret, une critique lucide des rapports Nord-Sud, mais sans tomber dans le prêche inutile et l’invective creuse.
Ce que Cheikh Oumar Diagne refuse de comprendre, c’est que le vrai souverainisme n’est pas un boycott du monde, mais une façon intelligente d’y entrer sans renoncer à ses convictions. Ce que Sonko fait à Davos, ce n’est pas une soumission, c’est une affirmation : celle d’un Sénégal qui assume de dialoguer au plus haut niveau, tout en défendant ses intérêts et sa dignité. Voilà ce que les aigris ne supportent pas : un patriotisme lucide et pragmatique qui avance sans cris ni théories fumeuses.
Derrière ses diatribes, ce n’est pas la justice du monde que Cheikh Oumar Diagne défend : c’est son amertume mal digérée, son exclusion du jeu réel, sa nostalgie d’une influence perdue. C’est là que réside la véritable farce : dans cette posture de prophète frustré qui, faute d’impact, vocifère sur tout. L’activiste d’hier est devenu un commentateur fâché, pour qui toute démarche constructive est suspecte, toute ouverture un piège, toute réussite un affront personnel.
La vérité, camarade, c’est qu’il n’aurait jamais dit cela s’il était encore à la Présidence. Il aurait loué l’ouverture stratégique du Sénégal au concert des Nations. Il aurait fait une vidéo sur « la présence du Sénégal dans les lieux de décision mondiale ». Mais l’éloignement du pouvoir lui a ôté la mesure. Et désormais, tout ce qu’il ne maîtrise pas, il le caricature.
Davos n’est pas une farce. Ce qui en est une, c’est de réduire les efforts diplomatiques d’un pays à des postures politiciennes aigries. Le monde avance. Le Sénégal aussi. Qu’on le veuille ou non.