Par Mamadou Sèye
Il faut parfois déchiffrer les silences, écouter les gestes et comprendre les absences. La visite du Président Bassirou Diomaye Faye à Saint-Louis n’a pas été une visite de chef d’Etat au sens ancien du terme. Ce n’était ni une parade, ni un bain de foule, ni un rassemblement de griots politiques. C’était une immersion républicaine, presque stoïque, dans une région stratégique mais longtemps négligée. Un déplacement à la fois modeste dans sa forme, mais audacieux dans son ambition.
En foulant les terres du Walo, le président n’a pas cherché l’ovation facile. Il a préféré regarder les réalités en face, celles d’un potentiel agricole immense, asphyxié par des décennies d’incohérence dans la politique d’irrigation, de conditionnement, de distribution et de gouvernance foncière. A Ndiayène Pendao, il ne s’est pas contenté de saluer les producteurs. Il a écouté, posé des questions concrètes, visité des unités, pris des notes. Cela peut paraître banal. Ça ne l’est pas. Cela témoigne d’un renversement de posture : le pouvoir descend au terrain, non pour y régner mais pour y apprendre.
Cette méthode tranche avec le folklore de l’ancien régime. Pas de tentes dressées à la hâte, pas de mobilisations artificielles en cars loués, pas de promesses à la volée. Le président Diomaye a incarné cette promesse nouvelle d’un Etat sobre, mais présent, d’un Etat moins verbeux, mais au travail, d’un Etat qui n’entend pas se faire aimer, mais se faire respecter. Et c’est là toute la nouveauté de cette gouvernance.
Il serait facile, pour les observateurs pressés, de pointer du doigt la “faible mobilisation” populaire. Mais ils oublient l’essentiel : le Président n’était pas en campagne. Il n’a pas demandé qu’on l’applaudisse. Il est venu pour comprendre. Pour voir. Pour écouter. Et ce n’est pas un détail : la République est de retour quand elle se déplace sans chercher à se faire acclamer. Ce type de présence-là, rarissime sous nos cieux, est peut-être la meilleure des campagnes à long terme.
Enfin, en rencontrant les élus de toutes tendances du Pôle Nord, Diomaye a rappelé qu’il est le président de tous les Sénégalais, y compris de ceux qui ne l’ont pas soutenu. La République, dans sa meilleure expression, c’est cela : un dialogue constant avec les institutions locales, une écoute égalitaire, une parole tenue. Et en clôturant sa visite par une audience avec les responsables locaux de son propre parti, il n’a pas confondu sa base militante avec la Nation. Il a simplement remis chaque acteur à sa place, dans une chorégraphie politique où le militantisme ne doit pas étouffer la République.