Mamadou Sèye
31 juillet 2023 – 31 juillet 2025. Deux ans, jour pour jour. Il y a deux ans, Ousmane Sonko entrait en prison. Son parti, le PASTEF, était dissous dans un climat de fer et de feu. Les mêmes rues où ses militants scandaient son nom résonnaient alors de sirènes, de gaz lacrymogènes et de cris étouffés.
Et voici que, ce 1ᵉʳ août 2025, au Grand Théâtre de Dakar, le même homme, devenu Premier ministre, présente devant la Nation le plan de redressement national, sous la présidence effective de Bassirou Diomaye Faye.
Quelle ironie. Et quelle leçon.
Ce basculement n’est pas seulement une revanche individuelle ; il est la démonstration d’une chose essentielle : les idées survivent aux prisons. On peut dissoudre un parti, enfermer un homme, bâillonner une voix ; mais quand un peuple porte une aspiration, aucune porte de cellule n’est assez solide pour l’enfermer.
Aujourd’hui, le duo Diomaye-Sonko se tient là où, il y a deux ans, nul n’aurait parié les voir : au sommet de l’Etat, avec une responsabilité immense : celle de transformer une révolte en projet. C’est là que l’histoire devient exigeante. Parce qu’après les slogans vient l’épreuve des faits. Après la colère vient la construction. Après le refus vient la proposition.
Ce plan de redressement national sera jugé non pas sur la poésie des mots, mais sur la fermeté des actes. Le pays attend une rupture réelle : justice, emplois, souveraineté, dignité. Et il ne pardonnera pas l’inaction ou les demi-mesures. Ceux qui hier étaient les victimes du système sont désormais comptables de chaque minute passée au pouvoir.
La symbolique est puissante : le temps de la plainte est clos, commence celui de la responsabilité. L’excuse de l’héritage ne durera qu’un temps ; très vite, l’opinion exigera des résultats. L’histoire, elle, n’aura pas d’indulgence : ou bien cette séquence sera celle du redressement, ou bien elle ne sera qu’un épisode de plus dans le long roman des désillusions africaines.
Le chemin est étroit. Mais la chance qui s’offre à eux est unique. Ce pouvoir, ils ne l’ont pas reçu en cadeau : ils l’ont conquis au prix du sang et des larmes. Il leur a été donné par la force d’un peuple décidé à ne plus subir. La force d’un peuple les a portés ; la colère d’un peuple peut les renverser.
Ce matin-là, au Grand Théâtre, la scène va être saisissante : l’homme qu’on avait tenté de réduire au silence parlera , et cette fois pour gouverner. Et chacun, dans le pays, mesure à quel point deux ans peuvent suffire à renverser tous les destins.