Farba Ngom : quand la défense cherche à noyer le droit dans le vacarme

Par Mamadou Sèye


La conférence de presse des avocats de Farba Ngom, tenue ce 13 mai à Dakar, a tenté d’installer un récit d’acharnement politique. Mais face à des faits graves et une procédure régulière, seule une défense fondée sur le droit peut encore convaincre. Retour sur une opération de diversion habillée en plaidoyer.


La conférence de presse organisée par les avocats de Farba Ngom ce mardi 13 mai a eu tout d’un exercice d’équilibrisme entre la victimisation politique et le brouillage procédural. Au lieu de présenter une défense sobre, articulée autour des faits et du droit, les conseils ont préféré une posture émotionnelle, parfois conspirationniste, comme pour dissimuler l’évidence : leur client est inculpé, régulièrement placé sous mandat de dépôt, et bel et bien incarcéré au Sénégal.

A aucun moment, les avocats n’ont remis en cause la régularité de la procédure. Aucun vice n’a été relevé, aucun abus démontré. La convocation, l’audition, l’inculpation et la détention provisoire ont respecté à la lettre les exigences du Code de procédure pénale. Mais on a vu surgir sur le devant de la scène un discours politique déguisé, qui voudrait faire croire que l’on a affaire à un prisonnier d’opinion, un homme sacrifié sur l’autel d’une prétendue chasse aux sorcières.

Or, ce procès n’est pas celui d’un engagement politique, mais celui de flux financiers suspects, de mouvements bancaires à justifier, d’un train de vie dissonant avec les revenus déclarés. Ce sont des faits, pas des fantasmes. Et c’est le juge, pas le micro, qui tranche.

Il est révélateur que la défense se soit gardée d’entrer dans le vif du dossier. Plutôt que de répondre sur le fond aux éléments matériels à charge — les montants en cause, les circuits financiers, les acquisitions immobilières — elle a préféré une opération de communication, destinée à influencer l’opinion publique plus que le magistrat instructeur. Ce choix en dit long : quand le terrain juridique devient glissant, la tentation est grande de se réfugier dans la clameur.

Mais la justice sénégalaise a franchi un cap. L’ère de l’impunité est révolue. La présomption d’innocence demeure, mais elle ne saurait être un paravent contre les obligations de transparence et de reddition de comptes. Le mandat de dépôt qui frappe Farba Ngom n’est pas arbitraire. Il est motivé, encadré, révisable. Et surtout, il ne préjuge pas du verdict final : c’est au terme de l’instruction que la vérité judiciaire émergera.

L’on doit donc rappeler calmement mais fermement que ce n’est pas en criant au complot qu’on efface des charges lourdes. Ce n’est pas en tentant de politiser un dossier de droit commun qu’on le rend moins sérieux. Et ce n’est pas en convoquant les fidélités anciennes que l’on échappe à la rigueur de la loi. Le juge, lui, n’écoute pas les archives des régimes passés. Il épluche les comptes, il confronte les déclarations, il demande des preuves.

Farba Ngom a le droit de se défendre. Il a même le droit de clamer son innocence. Mais il n’a pas le droit, par avocats interposés, de discréditer une justice qui suit son cours avec méthode. Car c’est dans le prétoire, pas dans les salles de conférence, que s’écrira la suite.

Et si la vérité, au terme de l’instruction, devait lui être favorable, alors elle s’imposera à tous. Mais pour l’heure, c’est dans le silence des cabinets d’instruction, et non dans le fracas des micros, que le sort judiciaire de l’ancien griot du pouvoir se joue. Le peuple sénégalais, lui, a déjà parlé : il a choisi la transparence et la redevabilité. Et désormais, personne n’y échappera.

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