Le Parlement sénégalais en mue

Par Mamadou sèye

Ce n’était pas qu’une clôture de session. C’était une ouverture sur l’avenir.

En recevant ce lundi à Dakar les présidents des parlements mauritanien et gambien, le président de l’Assemblée nationale, El Malick Ndiaye, a fait plus que présider une cérémonie de fin de session. Il a posé un acte de refondation symbolique, ancrant notre institution parlementaire dans une logique de rayonnement régional, de diplomatie parlementaire et de rupture assumée avec les routines sans âme qui avaient trop longtemps vidé l’Hémicycle de sa substance.

A travers ce geste, l’Assemblée nationale du Sénégal cesse d’être une enceinte endogène pour redevenir ce qu’elle aurait toujours dû être : une agora au cœur du continent, ouverte aux voix amies, enracinée dans nos valeurs et tendue vers l’avenir. Il ne s’agit pas de folkloriser la coopération, ni de faire tapisserie institutionnelle. Il s’agit de bâtir, avec méthode et conviction, une diplomatie parlementaire active, soucieuse de sa souveraineté, et pourtant lucide sur l’impératif de convergence régionale.

Ce qui se joue ici dépasse l’anecdote. L’invitation conjointe de Fabakary Tombong Jatta (Gambie) et de Mohamed Bamba Ould Meguett (Mauritanie) est une lecture en actes d’une nouvelle doctrine parlementaire : institutionnaliser le dialogue sud-sud, mettre en réseau les expériences, sortir l’Assemblée nationale de son enfermement postcolonial. Une dynamique qui parle moins aux nostalgiques du formalisme parlementaire qu’aux bâtisseurs de sens, aux artisans d’un ancrage populaire.

Car El Malick ne se contente pas d’étoffer l’agenda diplomatique. Il refond les méthodes, réforme les outils, secoue les inerties. La révision du règlement financier interne (hérité de 1963), le projet « Le Parlement chez vous », la réduction du gaspillage documentaire, ou encore le retour des commissions de contrôle budgétaire sont autant de signaux qu’il entend moderniser sans fragiliser, ouvrir sans diluer, responsabiliser sans infantiliser.

Il faut dire les choses avec franchise : ce souffle nouveau dérange. Certains s’étaient installés dans le confort d’une Assemblée réduite à un rôle d’enregistrement. Ce n’est plus possible. Le Parlement redevient un pouvoir, et cela fait frémir ceux qui n’y croyaient plus, ou qui préféraient un Hémicycle docile.

En vérité, le geste d’hier est moins un coup d’éclat qu’une épure de vision. Une vision où le Sénégal, malgré les blessures démocratiques du passé récent, renoue avec l’audace institutionnelle, et redonne au débat public la dignité qu’il mérite.

Et si, pour une fois, c’était par l’Assemblée que renaissait l’espérance ?


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