Quand le Président et le Premier ministre se sont affrontés (pour de faux)

Par Mamadou Sèye


Les esprits malveillants rêvaient d’une brouille au sommet de l’Etat. Il fallait bien leur offrir un combat. Ils l’ont eu. Fiction pour conjurer les fantasmes.

Ce fut un duel que nul n’avait vu venir, mais que beaucoup attendaient, tapis dans l’ombre, ou plutôt dans les claviers. Un affrontement au sommet, entre deux hommes d’Etat… mais sur un ring imaginaire. D’un côté, le Président de la République, dont les séances matinales de musculation commencent à peser lourd sur la balance des biceps républicains. De l’autre, le Premier ministre, adepte affiché du vélo, des arts martiaux et de la course contre la montre politique. Entre eux, une pirogue : la pirogue Sénégal.

La rumeur d’une divergence avait été soufflée à coups de phrases mal interprétées. Le Président appelle à un dialogue national le 28 mai. Quelques heures plus tard, le Premier ministre déclare qu’il n’y a pas de problème politique au Sénégal. Il n’en fallait pas plus pour que certains crient à la discorde, brandissant des alertes comme on agite un chiffon rouge devant deux taureaux.

Alors, pour calmer les esprits, le combat imaginaire fut organisé. Le chef de quartier fut réquisitionné. Les cousins furent mobilisés pour la médiation. Et, dans l’arène invisible mais symbolique, les deux hommes s’affrontèrent… avec élégance.

Round 1 :
Le Premier ministre ouvre les hostilités par une feinte de Taekwondo, inspirée d’un stage effectué en Corée. Il avance, véloce, concentré, avec la rapidité d’un homme habitué à pédaler entre les contradictions politiques.

Round 2 :
Le Président, en vieux routier de la lutte traditionnelle sérère, saisit son adversaire par la taille politique et le plaque avec douceur, mais fermeté. Le public invisible applaudit. Les analystes s’affolent : « Qui l’a emporté ? »

Mais la vérité, c’est que ce combat n’a jamais été une opposition. Plutôt un pas de deux, chorégraphié pour rappeler que les véritables adversaires ne sont pas dans le camp d’en face, mais dans le passé. Car à Sangomar, leur pirogue s’était brisée en deux : une moitié avait dérivé vers Ziguinchor, l’autre vers Mbour. Aujourd’hui, au sommet de l’Etat, ils en ont recomposé les fragments pour ne former qu’une seule embarcation : celle de la réconciliation, de la justice et de la reconstruction.

Moralité : ceux qui veulent à tout prix opposer les deux têtes de l’Exécutif finiront, eux, les bras croisés, à attendre un second round qui ne viendra jamais. Car le seul vrai combat, c’est celui pour le Sénégal.

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