Recomposition politique : Khalifa Sall et Barthélémy Dias se séparent

Par Mamadou Sèye

Il arrive que les séparations les plus significatives se fassent dans un murmure, plutôt qu’au fracas des disputes. Ce qui s’est passé entre Khalifa Sall et Barthélémy Dias, hier encore associés dans une alliance politique à forte charge symbolique, ressemble fort à l’un de ces silences qui parlent. Une rupture à l’amiable, dit-on. En vérité, un réagencement profond des lignes dans l’espace oppositionnel sénégalais.

Le compagnonnage entre Khalifa et Barthélémy était devenu, pour beaucoup, un acquis. Deux figures au style distinct mais à l’ancrage commun, liées par les épreuves et les batailles, notamment celle pour la mairie de Dakar. L’un, l’aîné, charismatique et réfléchi ; l’autre, fougueux, tranchant, audacieux — ensemble, ils formaient un équilibre presque nécessaire, comme deux notes justes dans une partition risquée. Mais l’histoire politique, même quand elle s’écrit dans la loyauté, obéit rarement aux lois de la constance.

Il serait naïf de réduire cette séparation à une simple divergence d’humeurs ou à un incident de parcours. Elle est le fruit d’un processus, lentement mûri dans les replis d’une coalition en quête de cap, fragilisée par des défaites successives, exposée à l’usure des ambitions et aux contraintes d’un échiquier politique en recomposition. La perte du leadership de Barthélémy Dias au sein de Taxawu Sénégal n’est pas un détail organisationnel ; c’est le symptôme d’un recentrage assumé par Khalifa Sall, probablement désireux de redonner souffle à un appareil dont il fut le principal architecte.

Il faut savoir lire entre les lignes : cette décision n’est ni un désaveu brutal ni une vengeance politique. Elle ressemble plutôt à une tentative de remise en ordre, une volonté de retrouver la cohérence d’un projet affaibli par les interférences et les turbulences. Le moment est délicat, mais il n’est pas sans portée stratégique. Khalifa Sall, revenu au centre de la scène, semble vouloir reprendre la main sur sa destinée politique, loin des incertitudes et des profils devenus ingérables.

Quant à Barthélémy Dias, sa trajectoire, marquée par la confrontation, la rupture de style et l’indépendance de ton, n’est pas nécessairement compromise. Mais il lui faudra, pour rester audible, redéfinir sa posture. Hors de l’ombre tutélaire de Khalifa, il lui appartient désormais de convaincre par son seul génie politique, dans un contexte qui pardonne peu.

Ce qui s’annonce n’est donc pas seulement la fin d’un binôme. C’est le début d’un nouvel équilibre, ou d’un déséquilibre à venir. Dans l’attente, les regards se tournent vers Dakar, cette capitale qui a toujours su précéder le reste du pays dans les mutations politiques. Une chose est sûre : les dynamiques en cours exigent de la lucidité, et surtout, de la hauteur.

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