Quand Paris vacille, Moscou rit et l’Afrique s’interroge

Par Mamadou Sèye

La France tremble. La démission éclair du Premier ministre français Sébastien Lecornu n’est pas un simple épisode politique : c’est un tremblement de terre institutionnel dont les ondes secouent l’Europe et au-delà. Ce n’est pas un homme qui tombe, c’est un système qui s’effondre sur lui-même, révélant les fissures profondes d’une démocratie fatiguée.

Un Président isolé, un Parlement paralysé. Depuis des mois, Emmanuel Macron tente de gouverner un pays morcelé : une gauche plurielle mais désunie, un centre présidentiel épuisé, une droite radicalisée en embuscade. Dans la tradition républicaine, le Premier ministre devrait émerger d’une majorité parlementaire. Macron a choisi autrement, préférant un homme fidèle mais isolé. Sébastien Lecornu aura tenté d’incarner l’unité nationale, et aura tenu à peine quelques jours.

L’hyper-présidentialisme a son prix. La France découvre que concentrer le pouvoir verticalement ne suffit pas à gouverner. Un chef tout-puissant mais sans bras politiques, un Parlement légitime mais impuissant, une société fragmentée où chaque force se rêve en sauveur. Ce désordre résonne comme une dissonance dans le concert occidental.

Le spectacle est cruel. Macron voulait incarner la “résilience démocratique”, mais la République qu’il dirige vacille. Aux yeux du monde, le pays des Lumières ploie sous le poids de ses institutions, les marchés s’inquiètent, les chancelleries observent, et les alliés européens s’éloignent.

Moscou jubile. Le Kremlin n’a pas besoin de mots : les images parlent d’elles-mêmes. Emmanuel Macron, accusateur de Poutine, se retrouve incapable de faire tenir sa propre maison. “Regardez vos démocraties ! Elles prêchent la stabilité mais tombent à la moindre contradiction. Elles donnent des leçons au monde mais ne savent plus se gouverner elles-mêmes.” Ce rire russe n’est pas innocent : chaque faiblesse occidentale nourrit la rhétorique du monde multipolaire.

L’Afrique observe. Là où Paris prétendait incarner la raison et la continuité, elle montre la confusion et l’impuissance. Là où elle sermonnait Bamako, Niamey ou Ouagadougou sur la stabilité, elle se révèle incapable de voter une loi sans 49.3. La Russie s’en félicite subtilement : elle se positionne comme partenaire constant et respectueux, tandis que des forces comme Wagner consolident leur présence au Sahel.

La crise française fragilise l’Occident. Une France sans gouvernement fort, c’est une Europe sans boussole, une OTAN affaiblie, un Sud global sceptique. Et dans ce vide, Moscou s’engouffre, Pékin avance, Ankara manœuvre. La France n’est plus crainte ni admirée : elle inspire désormais le doute.

La leçon est claire. La démocratie sans cohésion devient paralysie, la morale sans puissance devient rhétorique. Macron voulait incarner modernité et lucidité, il se retrouve à nu : Président sans majorité, sans relais, sans souffle. L’histoire est impitoyable pour ceux qui confondent verticalité et autorité, communication et conviction.

Le monde regarde. La Russie gagne la bataille du récit, l’Afrique compare, écoute et jauge. La démission de Lecornu dépasse la France : elle marque le basculement d’un imaginaire politique. Quand Paris chancelle, c’est toute une idée de puissance, de stabilité et de raison qui tremble. Et dans ce silence inquiet, on entend le rire discret du Kremlin et le murmure pensif des capitales africaines.


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