Refus américain, fierté sénégalaise : l’heure d’en finir avec la mentalité de quémandeur

Par Mamadou Sèye

Il est des actes qui, à eux seuls, suffisent à révéler l’état d’esprit d’un peuple et la nature de ceux qui le dirigent. Le récent refus des Etats-Unis d’accueillir notre équipe nationale féminine de basketball pour un stage de préparation aurait pu être un simple incident logistique. Mais la réaction de certains de nos compatriotes, face à la réponse souveraine du Premier ministre Ousmane Sonko, en dit long. Trop long.

Car que s’est-il passé, au fond ? Les USA disent non à notre équipe. Le chef du gouvernement prend acte. Il décide : le stage se fera ici, chez nous. Mieux, il remercie un pays ami – la Chine – pour avoir, elle, consenti à soutenir nos jeunes sportifs avec des bourses et des facilités. Et tout de suite, une salve de critiques : manque de diplomatie ! Attitude revancharde ! Il fallait “négocier” davantage !

Mais à quel moment avons-nous décidé que notre fierté devait être soumise à validation étrangère ?

Ce réflexe pavlovien qui pousse certains à courber l’échine dès que “l’Occident” hausse un sourcil a un nom : la mentalité de quémandeur. Cette dévotion inconsciente à ce que l’on appelle “la diplomatie”, mais qui se résume trop souvent à une attente docile de faveurs, est une survivance de siècles de dépendance consentie.

Le refus américain ? Ils en ont le droit.
La réaction du Premier ministre ? Il en avait le devoir.

Car ce que cette décision affirme, c’est que le Sénégal n’est pas une province d’outre-mer d’un quelconque empire moral ou financier. Nous avons des infrastructures, des entraîneurs, un public. Le sport de haut niveau, ce n’est pas qu’une question de visa : c’est d’abord un état d’esprit, une volonté de s’élever.

En décidant que le stage se déroulera au Sénégal, Sonko ne se replie pas sur lui-même : il réaffirme que l’on peut grandir en se tenant debout, pas en rampant dans les couloirs de l’ambassade.

Quant au clin d’œil adressé à la Chine, il n’a rien d’un pied-de-nez. C’est une manière très politique de dire que les équilibres internationaux changent. Qu’un pays comme le nôtre a le droit de diversifier ses partenariats, et de remercier ceux qui, au lieu de nous faire la leçon, nous tendent la main.

Il ne s’agit pas de verser dans le populisme sportif ni de céder à la flatterie des alliances. Il s’agit d’affirmer que nous n’avons pas besoin de demander la permission pour être fiers. Que le Sénégal est assez grand pour prendre soin de ses filles, qu’elles soient basketteuses, lycéennes ou chercheuses en herbe.

Et si ce sursaut de dignité dérange certains, c’est peut-être parce qu’il vient bousculer des réflexes enkystés. Nous avons été longtemps des « bons élèves », silencieux, polis, disciplinés. Peut-être est-il temps d’être libres, bruyants s’il le faut, mais déboutés de toute docilité.

Le sport, comme la diplomatie, est aussi une arène d’affirmation. Et dans cette arène, le Sénégal n’a pas vocation à jouer les seconds rôles.

A force d’attendre des visas, certains finissent par perdre leur vision.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *