Par Mamadou Sèye
Il faut le dire clairement : la décision de Google d’appliquer une TVA de 18 % sur ses services numériques au Sénégal, à compter du 1er juin prochain, est une victoire silencieuse mais puissante de la souveraineté fiscale. Elle consacre l’idée que même les mastodontes de la tech ne peuvent plus opérer en roue libre sur notre territoire, engranger des revenus sans contrepartie, ni se soustraire à l’effort collectif.
Dès le 1er juin 2025, Google appliquera une TVA de 18 % sur ses services numériques au Sénégal. Une décision historique qui témoigne de la montée en puissance d’un Etat désormais plus affirmé face aux géants du numérique. Salutaire, cette avancée demande toutefois d’être adossée à une politique d’accompagnement pour préserver l’équilibre du secteur.
C’est un pas de géant pour notre administration fiscale. Et c’est aussi, à n’en point douter, un signal fort que le nouveau pouvoir sénégalais continue dans la voie du renforcement de l’Etat stratège et régulateur. A ceux qui doutaient de la capacité du Sénégal à faire entendre sa voix dans la jungle numérique mondiale, la réponse est donnée avec fermeté, méthode et efficacité.
Bien entendu, ce tournant fiscal doit être mis en perspective. Il ne suffit pas de taxer les plateformes internationales. Il faut également s’assurer que cette pression fiscale ne vienne pas étouffer les écosystèmes locaux : PME, médias en ligne, créateurs de contenu, start-up, qui dépendent eux-mêmes des services numériques pour exister. Une TVA mal calibrée pourrait avoir l’effet inverse de celui recherché : freiner l’innovation au lieu de l’encourager.
C’est ici que réside tout l’enjeu pour les autorités. Car elles ont su initier cette réforme avec fermeté, il leur faudra maintenant la piloter avec lucidité. Le Sénégal, en se dotant d’un cadre fiscal pour le numérique, montre qu’il avance. Mais il doit aussi accompagner cette dynamique avec des politiques publiques inclusives : accompagnement des jeunes entrepreneurs digitaux, réduction du coût d’accès à Internet, soutien aux incubateurs, etc.
Ce qu’il faut éviter à tout prix, c’est une fiscalité punitive. Ce qu’il faut privilégier, c’est une fiscalité intelligente, stratégique, adossée à une vision. La taxation de Google n’est pas une fin en soi. Elle est un début. Le début d’une ère où le Sénégal, fort de ses institutions, de sa lucidité et de son ambition, affirme qu’il ne veut plus rester en marge de l’économie numérique mondiale, mais en être un acteur respecté.
Oui, la fiscalité numérique est un levier de justice et de développement. Et dans ce domaine aussi, le Sénégal montre qu’il peut donner le ton.