Diomaye revient d’Espagne et ajuste la boussole sécuritaire

Mamadou Sèye

Le président Bassirou Diomaye Faye est rentré d’Espagne après une visite officielle aussi sobre que stratégique. Loin du folklore diplomatique habituel, ce déplacement a été marqué par des rencontres de haut niveau et des engagements concrets. Le point d’orgue : la co-présidence d’une importante réunion bilatérale avec le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez, consacrée à la coopération dans les domaines de la migration, de l’emploi, de la formation et de la sécurité.

Cette session, qualifiée de « partenariat renforcé pour un avenir partagé », a permis de réactiver plusieurs leviers d’aide au développement, notamment dans les régions les plus concernées par l’émigration clandestine. Des projets sont en gestation autour de l’agriculture durable, de l’entrepreneuriat jeune et de la formation technique. L’Espagne, qui voit le Sénégal comme un partenaire-clé pour stabiliser la façade atlantique, a promis de faire plus qu’accompagner : elle veut co-construire.

Mais ce voyage ne fut pas qu’affaire de contrats et d’agenda diplomatique. A son retour, Diomaye Faye a lâché une phrase qui résonne comme un séisme dans l’écosystème sécuritaire : « L’Etat ne doit plus être complice des dérives policières. » En une seule déclaration, il a brisé une décennie de non-dits, de langue de bois et de protection institutionnelle des abus.

Il ne s’agissait pas d’un règlement de comptes, ni d’un acte de défiance envers les forces de l’ordre. Au contraire, le chef de l’État a clairement salué le rôle indispensable de la police dans la protection des citoyens. Mais il a surtout rappelé que l’autorité républicaine ne peut survivre si elle se fonde sur la peur, l’arbitraire ou l’impunité. C’est un changement de logiciel.

Dans un pays marqué par les morts tragiques de jeunes manifestants, les arrestations abusives et le silence glacé des pouvoirs précédents, cette parole présidentielle rétablit un contrat moral entre l’État et le peuple. Le message est limpide : désormais, chaque comportement policier sera scruté, chaque abus assumé, et chaque responsable rappelé à l’ordre.

Pendant que Sonko bouclait une tournée géopolitique musclée en Chine, enchaînant les audiences avec les plus hautes autorités du Parti et de l’État, Diomaye Faye s’installait à Madrid dans une posture plus feutrée, mais tout aussi déterminée : repositionner le Sénégal comme un acteur fiable, sérieux, capable de construire un développement endogène et digne. Ce duo politique, atypique mais cohérent, semble avoir trouvé une dynamique où chacun joue sa partition au service du même projet.

En somme, le voyage espagnol aura été plus qu’un déplacement présidentiel : un signal. Celui d’un État qui veut réconcilier diplomatie, justice sociale et autorité républicaine. Et si la rupture devait avoir un visage, ce serait peut-être cette image : un président qui revient d’Europe pour dire que la force publique ne peut être un permis de brutaliser.

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