Par Mamadou Sèye
Il y a des soirs où l’histoire prend une voix.
Hier, Ousmane Sonko a parlé. Pas en Premier ministre seulement. Mais en homme blessé, lucide, debout.
Il a dit ce que le pays savait, mais que trop de puissants voulaient encore taire.
Il l’a dit en wolof, avec cette densité du verbe qui traverse les classes et les frontières : le dossier l’opposant à Mame Mbaye Niang sera rouvert.
Pourquoi ? Parce que de nouveaux éléments sont apparus. Parce que le rapport de l’Inspection générale des Finances, qu’on disait inexistant, est désormais disponible. Et accablant. Parce qu’il ne peut y avoir de justice tant que les rôles sont inversés entre les innocents et ceux qui fuient.
Car il faut le dire sans détour : Mame Mbaye Niang, plaignant devenu fuyard, est aujourd’hui introuvable.
Celui qui accusait, celui qui se disait diffamé, a quitté le territoire, laissant derrière lui une affaire trouée de contradictions et d’impunités. Et dans son silence, chacun entend le bruit sourd de ce qu’il a voulu fuir.
Ousmane Sonko, lui, est resté. Il a affronté la machine judiciaire. Il a subi l’enfermement, l’invalidation, la diffamation politique. Mais il n’a jamais fui.
Et aujourd’hui, il gouverne — non par vengeance, mais par devoir.
Dans son discours, il a aussi évoqué la haine froide que certains lui vouent depuis des années, haine qui dépasse la politique pour toucher à l’obsession.
Mais il a refusé de répondre dans ce registre. Pour lui, la politique reste un débat d’idées, pas une mécanique de règlement de comptes. Et c’est cette hauteur de vue qui fait que lui seul, aujourd’hui, conserve une audience aussi intacte, aussi solide chez les Sénégalais de l’intérieur que chez ceux de la diaspora.
Il a salué les magistrats qui ont tenu bon, parfois dans le silence, parfois sous la pression. Il l’a fait avec gratitude et respect.
Mais chacun aura aussi entendu le sous-texte.
Car il y en a d’autres.
Et si le Président Diomaye Faye a fait le choix délibéré de rester, pour l’instant, membre du Conseil supérieur de la magistrature, c’est bien qu’un problème existe.
Ce n’est ni un geste symbolique, ni un détail protocolaire. C’est un signal.
Des choses sont en cours.
Des faits seront rendus publics.
Et des explications seront exigées, au nom de l’indépendance qu’on a trop souvent galvaudée.
Il ne s’agit pas de jeter l’opprobre sur un corps. Mais de rétablir une vérité abîmée : la justice a été utilisée, parfois, à d’autres fins que le droit. Et le temps est venu de tourner la page — avec précision, pas avec oubli.
Parallèlement, des investigations avancent.
Des terrains, des immeubles, des flux financiers, longtemps dissimulés derrière des prête-noms ou des montages opaques, font aujourd’hui l’objet d’un traçage méticuleux.
Ce qui remonte est grave. Tellurique. Et désormais irréversible.
De très grosses surprises à conséquences publiques sont désormais à l’ordre du jour.
Le pouvoir actuel n’agit ni dans la hâte, ni dans la vengeance. Mais il n’oublie rien. Et il n’abandonnera aucune piste. Ce pays a trop souffert pour que les fautes restent impunies.
Ousmane Sonko n’a pas seulement parlé. Il a tracé une ligne.
La justice ne sera plus instrumentalisée. Et les responsabilités, si elles doivent être établies, le seront.
Le peuple, lui, est déjà prêt.
Il a vu. Il a compris. Et il a choisi.