République, Diplomatie et Défense :Quand la parole politique devient une arme à double tranchant

Par Mamadou Sèye

La politique est un art noble. Mais elle exige des règles. Parmi celles-ci, la retenue dans la parole, lorsqu’il s’agit de diplomatie ou de défense nationale, n’est pas une option : c’est une obligation républicaine. Trop souvent au Sénégal, ces domaines régaliens sont pris en otage par l’agitation politique, transformés en terrains de polémiques, d’ignorance et parfois de mise en danger de l’intérêt supérieur de la Nation.

Il y a dans l’opposition sénégalaise, heureusement, des figures qui incarnent la maturité, la culture d’Etat, et une conscience aiguë des limites à ne pas franchir. Khalifa Ababacar Sall en est une illustration vivante. Chez lui, la République n’est pas un slogan : c’est une colonne vertébrale. Il sait que l’on peut contester avec vigueur sans jamais fragiliser la maison commune. Il sait aussi qu’il y a des silences plus éloquents que mille discours.

Mais à côté de cette élite lucide et républicaine, il y a les autres. Ceux dont la seule boussole est la polémique, dont le seul carburant est le buzz. Des « agités de la République », prompts à parler de tout, souvent à tort, surtout quand il faudrait réfléchir. Certains d’entre eux confondent l’arène politique avec une scène de théâtre, et la parole publique avec un déversoir d’émotions brutes.

Or, quand il est question de relations internationales ou de sécurité nationale, chaque mot compte, chaque phrase peut avoir un effet domino, chaque imprudence peut coûter cher. Dans ce domaine, l’improvisation est un luxe que les Nations sérieuses ne se permettent pas. Et quand elle devient récurrente, elle cesse d’être une maladresse pour frôler la trahison. Oui, la trahison.

Car que faut-il penser d’un acteur politique qui, en pleine tension diplomatique, s’autorise des déclarations incendiaires susceptibles de compromettre des négociations en cours ou d’alimenter une crise ? Que dire de celui qui, en ignorant tout des secrets de la défense, se permet de jeter en pâture des informations sensibles au nom d’une prétendue liberté d’expression ? La liberté politique n’est pas l’anarchie verbale. Il y a des seuils de responsabilité qu’on ne peut franchir sans conséquences.

La pédagogie doit jouer son rôle. Les formations politiques, les médias, la société civile doivent continuer à instruire, expliquer, conscientiser. Mais il arrive un moment où, face à certains égarements, l’Etat doit sévir. Pas pour museler. Mais pour protéger. Quand les intérêts supérieurs de la Nation sont en jeu, le silence de la raison vaut mieux que le vacarme de l’ignorance.

La République n’est pas un ring. C’est un pacte. Un pacte entre ceux qui gouvernent, ceux qui aspirent à gouverner, et ceux qui observent. Ce pacte repose sur un socle : la loyauté envers la Nation. Ceux qui le bafouent, en conscience ou par légèreté, ne méritent ni indulgence ni excuse. Car dans une démocratie sérieuse, on ne joue pas avec la souveraineté.


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